La 30 Assault Unit, une unité vraiment très spéciale

Pendant le second conflit mondial, les Britanniques ont mis sur pied de petites unités spécialisées hautement entrainées pour mener des opérations délicates et secrètes. Je vous présente l’une d’entre elles, sûrement une des moins connues. Vous serez étonné d’apprendre que Ian Fleming, le père du célèbre agent 007, était l’un des membres de la 30AU.

En septembre 1942, le directeur du renseignement naval autorisé la formation d’une unité spéciale de renseignement (Special Intelligence Unit), s’inspirant de l’Abwehrkommando. Sa particularité est d’être composée de spécialistes des trois armes (Terre, Air, Mer) à savoir la 33 Troop (Royal Marines), la 34 Troop (Army), la 35 Troop (Royal Air Force) et la 36 Troop (Royal Navy). L’unité est rebaptisée la 30 Royal Navy Commando (Special Engineering Unit). La mission première de ses hommes est de capturer des renseignements sous la forme de codes, de documents, de matériel ou de prisonniers en suivant la progression des troupes alliées ou bien en menant des opérations d’infiltration sur les arrières de l’ennemi.

En conséquence, les hommes sont formés aux techniques commandos, au maniement d’armes et d’explosifs. Ils sont à la fois capables de sauter en parachute (comme le Special Air Service) et de s’infiltrer en canots (comme le Special Boat Squadron). Ils se spécialisent dans la recherche de renseignements militaires de toute sorte et apprennent à mener des interrogatoires pour soutirer des renseignements aux prisonniers.

Des hommes du No.4 Commando avec un soldat allemand capturé à Varengeville près de Dieppe le 19 août 1942. (c) Imperial War Museum – www.colourise.sg

L’unité reçoit ses ordres directement du War Cabinet et de l’ Intelligence Community. Elle est déployée pour la première fois lors du raid sur Dieppe le 19 août 1942 pour s’emparer d’une machine Enigma et des précieux livres de code l’accompagnant. Malheureusement, la mission est un échec. Elle va prendre part à au débarquement en Afrique du Nord (opération Torch). Le 8 novembre, leur avion atterrit sur la piste de Sidi Ferruch à l’ouest d’Alger. Munis de cartes et de photographies de la région, les commandos britanniques s’emparent du quartier-général de la marine italienne et font main basse de précieux documents. L’unité scindée en plusieurs groupes, dans les îles grecques, en Norvège, à Pantelleria, en Sicile, en Italie ainsi qu’en Corse. La 34 Troop opère notamment en Italie.

En novembre 1943, l’unité est renvoyée en Grande-Bretagne afin de se préparer pour le débarquement en Normandie. Elle est renommée 30 Assault Unit en décembre et réorganisée en trois Troops de combat (A, B, C), une Troop de commandement (HQ), une unité de transmission et une unité médicale de la Royal Navy.

Formation badge de la 30 Assault Unit. (c) DR

Des plages normandes à Paris

Le 6 juin 1944, le détachement Pikeforce de la 30 AU débarque sur la plage de Juno avec pour objectif de participer à la capture de la station-radar de Douvres-la-Délivrande pour récupérer des informations sur les radars de surveillance aériennes. Cependant, la garnison allemande solidement retranchée va tenir jusqu’au 17 juin.

Photographie aérienne de la station radar de Douvres-la-Délivrande. (c) DR

Une autre Troop baptisée Wollforce, menée par le Squadron Leader David Nutting de la RAF, débarque sur la plage d’Utah le 10 juin et accompagne les troupes américaines jusqu’à Cherbourg. Les Britanniques doivent étudier les installations de lancement de fusées V-1 installées dans le Cotentin (notamment celle de Brécourt) et faire le coup de feu aux côtés des Américains dans Cherbourg. Ils progressent dans le secteur d’Octeville, au sud-ouest du port, dans le but de s’emparer de la Villa Maurice abritant le QG de la Kriegsmarine (cliquez pour visionner la vidéo). Une vingtaine d’officiers et 500 soldats allemands sont capturés. Le Captain Hargreaves-Heap de la Royal Navy apporte son aide à la capture de l’Arsenal et étudie le plan de minage du port et des entrepôts. Au 30 juillet, l’unité installé sa base à Carteret où le matériel capturé est étudié. Les pertes sont remplacées et des véhicules sont perçus.

Un groupe d’officiers de la Kriegsmarine et de la Heer sous la garde d’un commando de la 30 Assault Unit quelque part dans Octeville. (c) DR – www.colourise.sg
La villa Maurice aux mains des troupes alliées. (c) US National Archives – www.colourise.sg
Le site de lancement de Brécourt. (c) US National Archiveswww.colourise.sg

En août, elle reprend sa progression vers la Bretagne, puis emboîte le pas à la 2e DB progressant vers Paris (Woolforce II). Leurs Jeeps se déplacent rapidement et évitent les points de résistance. Elles pénètrent dans Paris par la porte d’Orléans et se fraie un chemin jusqu’au pont Mirabeau. Ils se rendent maîtres du château de la Muette abritant le QG du Grossadmiral Karl Dönitz et font main basse sur plusieurs tonnes de documents. Ils capturent des entrepôts souterrains à Houilles et Saint-Cloud abritant de précieuses torpilles acoustiques expérimentales G7 (T5) « Zaunkönig » (« Roitelet ») ainsi qu’une documentation technique complète. Une équipe se rend à Brest pour récupérer du matériel sensible, tel que des pièces d’un radar Freya ou encore un système de contrôle de tir de la batterie d’artillerie côtière Scharnhorst.

La chasse aux savants nazis

Les carcasses inachevées d’U-Boote Type XXI dans le port de Brême. (c) DR – www.colourise.sg

Le mois suivant, la section C de la 30 Assault Unit mène une série d’opérations dans des Jeep armées contre les ports côtiers de la Manche encore aux mains des Allemands. Le Captain Herbert Huntington-Whiteley est tué le 12 septembre au Havre. Les sections A et B sont envoyées à Toulon et à Strasbourg. En mars 1945, sept membres de la 30 RN Commando Troop sont parachutés dans la région d’Asti en Italie. Les Royal Marines capturent ensuite la base navale allemande de Brême en mai. Ces spécialistes de l’infiltration et du renseignement vont également traquer des scientifiques nazis ayant travaillé dans le domaine de la recherche atomique qui suivent le 8 mai 1945. Les scientifiques localisés sont arrêtés sur-le-champ et exfiltrés vers la Grande-Bretagne. Aujourd’hui encore, personne ne sait rien de très précis sur les résultats de cette opération.

L’héritage

En août 1945, les Royal Marines de la 30 Assault Unit sont envoyés en Extrême-Orient, mais la capitulation du Japon interviendra avant qu’ils puissent intervenir. L’unité fait de nouveau parler d’elle à en Indochine, à Singapour et à Hong Kong avant d’être officiellement dissoute en 1946. Aujourd’hui, le 30 Commando Information Exploitation Group des Royal Marines (30 Cdo IXG RM) a repris le flambeau de ses glorieux ainés.

Pour en savoir plus :

David C. Nutting, Attain by surprise, Capturing Top Secret Intelligence in WWII. Editions David Colver, 2003, 315 pages.

Nicholas Rankin, Ian Fleming’s Commandos: The Story of 30 Assault Unit in WWII, Faber & Faber, 2011, 423 pages.

Stéphane Jacquet, De la Normandie à la Baltique avec la 30 Assaut Unit, in 39/45 Magazine n°30, Editions Heimdal

Nicolas Bucourt, Sur les traces de la 30 Assault Unit au Havre, in Normandie 1944 Magazine21, Editions Heimdal, 2016.

1 thought on “La 30 Assault Unit, une unité vraiment très spéciale

  1. Histoire /philosophie

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