Connaissez-vous l’origine du Fanta ?

A gauche une bouteille de Coke made in U.S.A. datée de 1942. A droite, sa consoeur made in Germany fabriquée en 1940. (c) koghisberg.com

Ces deux bouteilles de Coca-Cola sont à peu de chose près identiques, même design, même matériau, même contenance et même breuvage. Pourtant, ces reliques du passé nous racontent pour le moins une surprenante histoire.  

Les Allemands connaissaient le goût du Coca-Cola bien avant les Français

Ce cliché tiré d’un film d’époque a été pris en Allemagne dans les années 1930. (DR)

On dit souvent que le Coca-Cola est apparu en Europe avec l’arrivée des GI’s en 1944, ce qui n’est pas tout à fait exact. Les premières cargaisons de Coca-Cola ont été importées en France au printemps 1919 pour ravitailler les troupes américains, mais la boisson n’a pas réussi à s’imposer dans l’hexagone pendant l’entre-deux-guerres, ce qui n’a pas été le cas de l’autre côté du Rhin. La boisson, introduite dans le pays en 1929, s’est rapidement imposée en Allemagne sur le segment de marché des boissons gazeuses et ce malgré une féroce concurrence. En 1933, année de l’arrivée au pouvoir d’Adolf Hitler, la production avoisine déjà les 100 000 caisses. L’Allemagne est le second marché après les États-Unis pour la firme Coca Cola Bottling Co. à la veille de la Seconde Guerre mondiale.

Une compromission quelque peu dérangeante

Un soldat de Luftwaffe pose devant une camionnette de Coca-Cola Gmbh. (c) DR

La structure de l’entreprise, sa politique commerciale et de diffusion trouve un écho favorable et lui permettent de ne pas être victime de la politique nationaliste du IIIe Reich plutôt enclin à limiter les importations et décourager les entreprises étrangères. La marque américaine réussit le tour de force de s’imposer dans l’imaginaire collectif comme une marque allemande à part entière.

Comme de nombreux autres grands industriels, Robert Woodruff et Max Keith, directeur la filiale allemande Coca-Cola GmbH, font preuve d’une certaine complaisance vis-à-vis du régime nazi pour faciliter le développement de la marque qui devient un des fournisseurs officiels des JO d’été de 1936 qui se tiennent à Berlin. L’année suivante, Coke est l’une des attractions d’une foire berlinoise dédiée des ouvriers du Reich. Keith fait monter une petite usine d’embouteillage au centre de cette dernière. Un photographe de la société photographie Göring en dégustant un Coca-Cola. Les encarts publicitaires vantant les mérites de la boisson sont présents dans les périodiques, y compris ceux destinés aux militaires. Le jingle Coca-Cola est souvent le premier spot publicitaire à être diffusé après le Reichsrundfunk, le journal d’information du régime. En 1938, la neuvième convention annuelle du groupe réunit plus de 1 500 personnes. Un portrait géant de Hitler recouvre le mur derrière le podium. Keith s’exprime sous une énorme bannière Coca-Cola portant trois grande croix gammées noires sur fond rouge. Trois « Sieg Heil » clôture l’événement. A l’occasion du 50e anniversaire du Führer, Keith exhorte ses employés à exprimer leur reconnaissance envers celui qui « conduit la nation allemande vers les sommets ».

Un Ersatz de Coca …  

Affiche publicitaire pour le Fanta. (c) DR

Après l’entrée en guerre des États-Unis, la firme Coca Cola GmbH, la filiale allemande de la compagnie d’Atalanta ne peut plus importer le sirop de Coca, ingrédient indispensable à la fabrication du précieux breuvage. Une fois les derniers stocks épuisés, Max Keith travaille à l’élaboration d’une nouvelle boisson pour poursuivre son activité commerciale. Avec l’aide d’Erich Drafahl, pharmacien de son état, il élabore une recette à base d’ingrédients peu onéreux et disponibles en grande quantité. Une boisson est élaborée avec du lactosérum, un sous-produit issu de l’industrie fromagère et de la pulpe obtenue lors du broyage des pommes pour fabriquer le cidre. Les fruits entrant dans la composition peuvent varier en fonction de la saison et du lieu de production. Au début, un substitut du sucre, la saccharine, est utilisée comme édulcorant, mais il est remplacer par du sucre de betterave à partir de 1941. En raison de la pénurie, le Fanta est utilisé comme exhausteur de goût dans les plats et les soupes.

Les filiales installées dans les autres pays de l’Axe et les territoires occupés adaptent la recette en fonction des ingrédients disponibles. Keith demande à ses employés de lui trouver un nom en donnant libre cours à leur imagination. Finalement, la boisson est commercialisée sous le nom de Fanta, qui vient de l’allemand Fantasiegetränk qui signifie la boisson fantastique. Keith dispose d’un vaste réseau de vente. Trois millions de caisses de Fanta sont vendues en 1943.

Une élégante bouteille d’Afri-Cola, une des marques concurrente de Coca-Cola dans les années 1930-1940. (c) koghisberg.com

… Promis à un brillant avenir

Au lendemain du conflit, la Coca-Cola Company reprend le contrôle de sa filiale allemande et récupère les bénéfices réalisés par cette dernière, ainsi que les marques commerciales dont Fanta. La maison mère décide d’en arrêter la production. Néanmoins, le lancement de plusieurs boissons sur le marché européen par la société Pepsi dans les années 1950, décide Coca-Cola à relancer la fameuse boisson au goût orange en 1955. Cinq ans plus tard, elle fait son apparition aux États-Unis.

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